Des Italiens à la Guille

d'après la conférence de J.Luc Ochandiano du samedi 9 novembre 13 annoncée précédemment

•En 1780 la Guillotière compte 5000 habitants environ

En 1805 : 5 970 habitants, 1830 : 25 730 habitants, 1851 : 43 524 habitants,

1856 : 65 378 hab, 1880 : 78 013 hab, 1911 : 253 000… (notes extérieures à la conférence)

c'est une croissance énorme, non planifiée qui vient du fait que Lyon déborde, que la Guille s'industrialise et que les populations s'installent où elles peuvent.

La Guille a un bâti de pisé et de bois, précaire parfois, populations de rouliers (M.Garden) , de métiers de passage ou de saisonniers qui viennent des provinces limitrophes. Certains travailleurs restent quelques mois, font une saison, épargnent pour un appoint financier, d'autres restent un peu plus d'un an pour un capital. Pour certains paysans, la ferme ne fait pas vivre la famille, il faut s'exiler à la saison morte, avec un autre métier à la tâche, ou des produits à vendre.

Les migrants de la péninsule italienne sont des voisins un peu plus éloignés. Ce sont des itinérants, pas des migrants, certains sont colporteurs, artisans ou ouvriers à façon. On trouve par exemple, des étameurs ou des rétameurs, ils font de la vaisselle à étain, qu'ils vendent en basse saison, réparent celle abîmée. Ils viennent du nord du Piétmont et retournent chez eux pour les travaux des champs. Il y a aussi les figuristes qui fabriquent et vendent des objets décoratifs (mythiques, historiques, commémoratifs) en plâtre. Ils font un tour de France et au carrefour du Rhône et de la Saône s'arrêtent à la Guillotière, avant la barrière de l'octroi.

D'autres sont saltimbanques, musiciens, marionnettistes, montreurs d'animaux, ils divertissent et vivent de la quête.

Il s'agit d'une population masculine qui loge dans des garnis.

•Puis on en voit certains se fixer. Ils sont ouvriers dans les usines et les ateliers du nord de Bèchevelin, certains ouvrent même leur atelier, fondent une entreprise, embauchent "des pays". Jona Vitta par exemple installe son entreprise de couvreur en 1841 vers ou sur la place Morand. Il se fera construire ensuite un hôtel-particulier boulevard du Nord (hôtel du Gouverneur)…

•Puis des femmes sont ouvrières dans les usines mécaniques des Brotteaux ou de VIlleurbanne (ourdissage, moulinage). Des Italiennes de la région turinoise en font partie. D'autres ouvrent des épiceries, des cafés-restaurants qui perdureront longtemps dans le quartier…

Alors qu'1/3 des ouvriers du bâtiment sont italiens en Presqu'Île, il n'en va pas de même à la Guille. À partir de 1850 ce sont les menuisiers et les charpentiers qui y vivent. Ensuite il y aura les plâtriers et les peintres, car avant le milieu du XIX° on travaillait plus la pierre à Lyon. Les décors en plâtres et ceux peints sont moins chers. Les Italiens connaissent bien ce travail.

Ensuite arrivent les paveurs de la région de Turin, qui fonderont, entre autres, des entreprises, comme Maïa qui deviendra Maïa & Sonnier entreprise de BTP bien connue des Lyonnais.

carte de présenation des entreprises d'Italiens sur Bèchevelin élaborée par J.Luc Ochandiano

De cette implantation naissent les associations, associations d'entre-aide, de divertissement. 

Fin XIX°-début XX°, au fur et à mesure de la diminution des saltimbanques, apparaissent les cafés-concerts. Les Lyonnais viennent toujours à la Guille se divertir. Un certain Alexandre Rotta ouvre plusieurs salles de cinéma en Presqu'Île et à la Guille. Il existe une société de musiciens, l'Union Musicale Italienne soutenue par les élites, comme par la population que l'on chiffre à 10 000 personnes fin XIX°. Cette société se scindera pour des raisons politiques en 1885, avec une seconde association l'Armonia.

Une entreprise fondé par un Italien fabrique des accordéons : Soprani, très connu.

Des photographes ouvrent également boutique, c'est pourquoi l'historien trouve des clichés qui témoignent de ces activités et des groupes décrits.

•Fin XIX°, une autre immigration italienne arrive du sud de Rome, du fait d'une grave crise économique. Ces migrants vont beaucoup en Amérique du Sud ou du Nord, certains viennent en France, parmi eux, quelques uns s'installent à Gerland, ils deviennent ouvriers dans les usines de la Rive-Gauche du Rhône.

Plusieurs périodes difficiles tâchent cette présence italienne,

-quand le travail diminue et que les ouvriers français se plaignent du travail à prix réduit des Italiens,

-lors de l'assassinat du Président Carnot,

-pendant la I°Guerre-Mondiale, l'Italie entre en Guerre en 1915 et rappelle ses ressortissants.

En 1914 on compte 12000 Italiens à Lyon, ils représentent 60% des immigrés.

•À la fin de la I°Guerre-Mondiale, d'autres migrants vont les rejoindre et le visage du faubourg va changer. D'autant plus que le quartier est laissé à l'abandon, une refonte urbaine laisse traîner les choses.

Entre-2-Guerres, une autre immigration italienne va venir, celle de l'exode politique à cause de la montée du fascisme. Les 1°anti-fascistes arrivent en 1922/23 à la Guille. Nombre d'entre eux sont mécaniciens et communistes. Ils formeront le Parti Communiste Italien local. Il y aura une Maison du Peuple et un congrès. En parallèle une section fasciste essaiera de drainer les Italiens de la périphérie.

 "Siège de la Maison du Peuple & du Syndicat des Maçons C.G.T.U."  près de la Place du Pont

Avec la crise de 1929 qui aura des répercussions à Lyon dans les années 1931/32, des migrants sont expulsés et des réactions xénophobes se font à nouveau jour. L'entrée en guerre de l'Italie fasciste n'arrange pas la situation. Il faut attendre 197… pour assister à la fin des discriminations et mesures administratives propres..

•Après 1945, les immigrés italiens viennent du sud de la péninsule.

Plus de détails et… l'histoire des Italiens à Lyon dans le livre qui vient de paraître.

pour en savoir + : voir la vidéo de la bml = 2h17